Ce passionnant roman d’un praticien de la conduite des actions militaires porte une double ambition : la première d’alerter sur la conflictualité dynamique qui affecte la planète et vise les intérêts européens, la seconde de postuler qu’une réponse collective des Européens est à leur portée. Il a une qualité rare, celle de montrer à la fois la variété des théâtres et terrains de conflit, l’approche militaire spécifique de chacun et la densité des opérations de planification opérationnelle multinationale. Il nous parle autant de guerre que d’Europe.
La volonté du chancelier fédéral de faire de l’armée allemande la première d’Europe soulève des défis historique, matériel et humain pour l’Allemagne. Cette vue est cependant incomplète, car la dissuasion, la construction d’une armée européenne et son articulation avec les armées nationales sont implicitement incluses dans l’annonce allemande. De quoi susciter de nouvelles réflexions en matière de stratégie.
Le 31 juillet, un drone américain a tué en Afghanistan Ayman al Zawahiri. Ce docteur égyptien suscite l’intérêt. Tout jeune, il rejoint les Frères musulmans et est fasciné par Sayyd Qutb, un dirigeant des FM exécuté par Nasser en 1966 et partisan d’un islam radical. Ainsi, Zawahiri fait la liaison entre ce courant radical issu des Frères et ce qui deviendra Al Qaida.
A la fin des années 1980, après quelques années de prison, il rejoint le Pakistan et se lie à O. ben Laden dont il devient le médecin personnel et avec qui il fonde Al Qaida. Ils rompent avec les Frères et théorisent une lutte islamique mondiale. Après la mort de ben Laden en 2011, il prend la tête du mouvement même s’il n’a pas le charisme de son prédécesseur.
La frappe américaine, symboliquement, clôt donc un cycle : celui de la malnommée « guerre contre le terrorisme » qui a influencé toute la pensée stratégique des vingt dernières années. Elle intervient alors que les taliban règnent à Kaboul et que les États-Unis sont lancés dans d’autres défis : celui du soutien à l’Ukraine et celui de la confrontation avec la Chine. Ce bilan médiocre ne signifie pas pour autant le succès du djihadisme : constatons en effet qu’il est toujours présent.
Notes de lecture
Pour vos lectures de vacances, nous vous proposons les ouvrages suivants :
Le traquenard (Boustani et Seznec)
Risques et dérives de la vie religieuse (de Lassus)
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Martine Cuttier, fidèle lectrice, nos livre une nouvelle fiche de lecture sur l’ouvrage d’un jeune chercheur spécialisé dans le DDR, notamment au Sahel . Merci. LV
Pour beaucoup, c’est une année inquiétante qui s’ouvre en 2022 sur fond de bruits de bottes, d’Ukraine en Taïwan pour les uns, du Yémen au Sahara occidental en passant par la Méditerranée orientale et le Sahel pour d’autres, partout où des points chauds se cristallisent. Le recours à la guerre est redouté, celui à la diplomatie ignoré.
Ainsi les alarmistes professionnels qui veulent resserrer les rangs des coalitions militaires d’hier se préparent à en découdre militairement avec des autocrates ciblés. Pour certains, la situation rappelle celle des années 1930 avec la montée des fascismes. Ce faisant, ces inquiets se posent plus en défenseurs du monde d’hier qu’en bâtisseurs d’une régulation des forces en présence dans le monde nouveau d’un XXIe siècle qui émerge, après la Guerre froide qui l’a fragmenté et avec la panne mondiale de la pandémie de Sras-Cov2 qui l’a fragilisé. De fait ces autocrates assumés et dénoncés à longueur de colonnes -Poutine, Xi Jinping, Erdogan- ces nouveaux tigres du XXIe siècle, récusent le caractère universel de l’ordre occidental établi en 1945. Ils veulent partager la gouvernance de la planète et la raccorder à leur histoire régionale, à leurs intérêts, à leur culture politique, à leurs valeurs.
La France et le plein exercice stratégique : AMR 2022
Pour clore cette année et nourrir le débat stratégique de la présidentielle, voici présentées les quatre logiques qui structurent la posture stratégique de la France fin 2021 : les voisinages, les compétitions, les frictions et les guerres froides. Dans le monde post Covid qui s’entrouvre faut-il garder ce logiciel dépassé du XXe siècle? Peut-on en explorer un autre pour permettre à la France dans l’Europe et à l’Europe dans le monde de proposer un autre point d’équilibre, dégagé de la rivalité entre les États-Unis et la Chine ? L’année 2022 sera-t-elle un jalon dans l’histoire stratégique de la France ou la réactivation de ses actions antérieures ?
Le dernier référendum a logiquement – et légitimement – décidé du maintien de la Nouvelle-Calédonie dans la nation française. Il reste pourtant encore un destin à construire, tant le Caillou reste divisé : ces divisions ressemblent à bien d’autres, y compris en métropole. Au-delà, c’est une stratégie Pacifique de la France qu’il faut bâtir.
L’expérience des peuples forge ce capital social qui leur permet d’être gouvernés. L’Amérique vient de la conquête de l’Ouest et de la prospérité, la Chine du Tianxia idéalisé et de l’harmonie prescrite, l’Europe du bannissement de luttes intestines après des tragédies dévastatrices. Il en résulte trois trajectoires stratégiques aujourd’hui non convergentes, même si un modèle essentiel de gouvernance occidentale s’affiche comme universel. Le modèle asiatique est dès lors vu comme alternatif et donc antagoniste. Mais ce que l’humanité gagnerait à s’unifier politiquement la priverait du pluralisme dont la richesse nait de la diversité acceptée.
Voici une leçon du dernier ouvrage de Jean Marie Guéhenno, « Le premier XXIe siècle » (ici) que LV vous recommande. Sa démarche tâtonnante mais rigoureuse dénonce le triomphalisme écervelé d’un Occident démocratique aujourd’hui en profonde crise identitaire qui s’aveugle d’une obsession chinoise et veut unifier le monde. Tout comme la Chine voulut prendre le meilleur de l’Occident pour garder le meilleur de la Chine, l’Occident ne doit-il pas prendre le meilleur de la Chine pour sauver le meilleur de l’Occident qui est le pluralisme assumé ? À explorer et méditer.
JOCV
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Notre fidèle correspondant, X. d’Abzac, qui nous avait déjà éclairé sur les débats en Chine (voir billet), nous propose ici une fiche de lecture du dernier ouvrage d’Anne Cheng. Mille mercis à lui. LV
En 2007, Anne Cheng présentait La pensée en Chine aujourd’hui (ici), un ouvrage collectif d’auteurs choisis pour leur compétence et leur indépendance. Plus de dix ans après, la réunion d’un nouveau collectif, nourri par la somme des mutations de la Chine, nous offre Penser en Chine, un ouvrage de synthèse sur l’état de ce pays qui a envahi notre paysage médiatique au quotidien dans tous les domaines.
Comment interpréter la guerre civile du Ruanda qui a conduit au génocide que l’on sait ? Un récent rapport a tenté de faire le point. Nous l’avions évoqué en parlant de la confrontation de la mémoire et de l’histoire (voir billet), registre souvent confondu dans les commentaires entendus ces dernières semaines. Il nous a semblé important de rendre compte du livre d’un acteur de l’époque, le GCA (2S) Delort. Martine Cuttier et Jean Dufourcq signent ce billet, merci à eux. LV
Début mars 2021, les Mémoires du général (2S) Dominique Delort paraissent peu avant la remise, fin mars, du rapport Duclert sur le Rwanda au président de la République. Tous deux éclairent un épisode aussi sensible pour les militaires que précieux pour les sociologues, politologues et historiens des questions militaires. Il s’agit en effet du rapport, en temps de crise, entre pouvoir et armées, celles-ci formant avec la diplomatie l’instrument de conduite par l’exécutif de la politique étrangère.
Merci à Martine Cuttier de continuer ses fiches de lecture. Celle-ci porte sur un ouvrage académique traitnat des Opex. Merci à elle. LV
Hormis les témoignages de militaires ayant participé à des opérations extérieures, ces dernières sont l’objet de publications, de rapports officiels de la part des parlementaires et de récapitulations par les militaires eux-mêmes. D’un côté, en août 2014, les officiers généraux en 2e section regroupés au sein du « cercle de réflexion G2S » ont publié un numéro sur « Défense et opérations extérieures » puis un an plus tard, le CDEF de l’armée de terre dans les Cahiers du RETEX, dressait un « bilan de 37 années d’opérations ininterrompues » de 1978 à 2015 suivi en novembre 2017 du numéro HS des chemins de la Mémoire, portant sur « La France en OPEX, 50 ans d’engagement ». Un sujet, source de colloques par le SGA[1] puis par le SHD qui deux années de suite a privilégié un thème[2] auquel l’IRSEM, à son tour, a consacré son attention. Le présent ouvrage n’étant autre que les Actes du colloque organisé avec l’université de Paris II[3], l’une des missions de l’IRSEM étant d’établir le lien avec le monde académique. Continue reading « Les opérations extérieures de la France (J. Fernandez, JB Jeangène Vilmer) »→
Pour ce sixième numéro d’été, voici quelques lectures hétéroclites pour vous distraire ou vous aider à approfondir des sujets complexes dont la pandémie du Covid 19 nous a appris à retrouver le goût et la nécessité. Bonne lecture. N’oubliez pas de vous réabonner et de nous diffuser largement. JOCV
Notre sélection :
Le crépuscule de l’universel Chantal Delsol, Ed. du Cerf, 2020
Retour de service John le Carré, Seuil, 2019
Le sous-marin qui a torpillé le mur de Berlin Thierry Dalberto A. Compte d’auteur, 2019
De l’autre côté de la machine Voyage d’une scientifique au pays des algorithmes Aurélie Jean, Ed l’Observatoire, 2019
C’était mieux avant Michel Serres, Manifeste le Pommier 2017
Paris-Berlin ; la survie de l’Europe E. Husson, Gallimard, 2019
World War Z Brooks, Broadway Books, 2011
Opération Serval, notes de guerre B. Barrera, Seuil, 2015
La Bombe Glénat, 2020
Carnets sahariens, suivi de Cinquante ans de Sahara Frison-Roche, Arthaud, 2009
Révolution Cyberindustrielle en France L. Bloch, Economica, 2015
Sept jours avant la nuit G.-P. Goldstein, Folio Gallimard, 2017
Histoire de l’Atlantique Paul Butel, Perrin Tempus, 2012
Mondes en guerre (2 tomes sur 4) Dir H. Drévillon, Passés composés, 2019
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