Nice : au-delà du choc

L’émotion, comme si nous n’avions rien appris

L’attaque de Nice a été tardivement revendiquée par l’Etat Islamique (36 h après l’attentat), alors que l’auteur de l’attentat présente un profil de déséquilibré et n’a pas ouvertement signalé son attachement à la cause djihadiste.  Pourtant, immédiatement, l’hypothèse terroriste a été mentionnée tandis que les commentaires politiques fusaient de toute part. Comme si les réflexes politiciens prévalaient sans prendre un instant de recul. Encore une fois, l’émotion balayait les flux d’information comme si on n’avait rien appris. Les médias se précipitaient dans la couverture en direct des événements, diffusant des images insoutenables, interrogeant de témoins qui n’en pouvaient mais, sombrant dans le spectaculaire sans jamais se poser la question de leur responsabilité. Car au-delà de la tristesse légitime que nous devons avoir, tout s’est passé comme si on n’avait rien appris. Aucun preneur de parole n’a réellement montré la dignité et surtout la distance stratégique qui convenait. Comme si c’était la première fois, comme si c’était une surprise, comme si on n’était pas préparé alors que chacun savait que d’une façon ou d’une autre, cela se reproduirait.

Attentat à Nice : des papiers d'identité au nom d'un Franco-Tunisien retrouvés dans le camion Source

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Faut-il penser l’EI au passé ?

Après une année 2014 marquée par la surprise devant l’émergence de l’État Islamique, une année 2015 inquiète devant sa résistance, ce début d’année 2016 semble marqué par un regain d’optimisme envers l’organisation. Ainsi, les instituts anglo-saxons dressent le décompte exact des pertes de territoire de l’organisation. Selon une étude de Janes parue en décembre dernier, elle aurait perdu 14 % de son territoire en 2015. Une autre étude de fin mars 2016 évoque le chiffre de 25 %. Ceci concerne l’Irak et la Syrie. On pourrait de même évoquer les revers subis par l’EI en Libye, dont la récente perte de Derna en Cyrénaïque. (Texte de l’intervention prononcée le 30 avril dernier au Forum International de Réalités, à Hammamet, en Tunisie. OK)

Le Royaume-Uni aurait tué un millier de combattants de l'EI. Source

Certains pensent alors qu’il y a une solution militaire à l’EI et que l’on réussira à l’annihiler. En avril, le ministre français de la défense, JY Le Drian, lors d’une visite en Irak, estimait qu’en 2016, aussi bien Rakka que Mossoul (les deux places-fortes de l’EI) pouvaient tomber (voir ici ). Dès lors, la question qui vient à l’esprit est la suivante, aussi provocante paraisse-t-elle : faut-il penser l’EI au passé ? Pour y répondre, nous évoquerons d’abord le Moyen-Orient puis la Libye, avant de conclure sur le cadre tunisien.
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N° 36 : Quelles sont les causes de l’État Islamique ? | Pour sortir de l’impuissance | Stratégie 2017 : vu de Rome

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Extrait des articles présents dans cette lettre :

Quelles sont les causes de l’État Islamique ?

Certains responsables continuent de parler de « guerre contre le terrorisme », refusant d’analyser les ressorts de l’ennemi nommément désigné, l’État Islamique. Or, il n’est de bonne stratégie que procédant d’un bon diagnostic qui exige la compréhension des sources de la puissance de l’ennemi. S’agissant d’un mouvement terroriste qui se prétend État, il convient donc de dresser le diagnostic des causes qui ont conduit à son apparition. Trois thèses sont couramment avancées : des racines socio-économiques, culturelles ou politiques. Étudions-les successivement. […]

Pour sortir de l’impuissance

Nous évoquions en début d’année le grand tournant stratégique qui se profilait en 2016 et les risques de dérapage (cf. LV 33). Comment notre posture de défense et de sécurité se prépare-t-elle à des évolutions d’une telle ampleur ?

La leçon inaugurale de la chaire des grands enjeux stratégiques nous apporte la réponse du ministre de la défense (texte ici). Ce tour d’horizon daté du 18 janvier, à la fois réaliste, pragmatique et serein, vaut d’être lu. On pourra certes déplorer des angles morts stratégiques, réticences politiques implicites à mener une véritable analyse de défense et de sécurité permettant de sortir d’une forme assumée d’impuissance. Mais il y a là une réflexion de qualité d’un ministère qui vient de migrer sur le site de Balard, l’Hexagone français, avec sa matière grise militaro-stratégique et sa capacité de décision et de conduite technico-opérationnelle. […]

Stratégie 2017 : vu de Rome (Amiral F. Sanfelice di Monteforte)

L’Occident a peur, face à l’agressivité de l’EI, et la France, durement frappée, peine à réagir psychologiquement aux attentats de Paris. Ce type de situation n’était pas inattendu. Nous vivons en effet dans un monde en transition où le revanchisme arabe a amassé tant de ressources humaines et une force financière si considérable qu’il peut nous opposer ses objectifs de puissance. Aujourd’hui, nos valeurs, nos idéaux et notre culture même, qui ont modelé le système international, sont durement contestés, voire rejetés. […]

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Pour Riyad, l’Iran est un ennemi bien commode

Il ne faut pas sur interpréter l’antagonisme entre Ryad et Téhéran.

Pour Riyad, l’exécution de Nimr al-Nimr est logique. Tout le monde ne voit que l’opposition à l’Iran, supposée constitutive de l’identité saoudienne ; peu remarquent que sur 47 exécutions, 46 ont concerné des jihadistes, pour la plupart liés à al Qaida.

Source

Le message est d’abord interne, à destination de la population du royaume, tandis que la guerre au Yémen piétine et que l’économie patine (baisse du prix du pétrole, budget en déficit, augmentation des prix). Il s’agit d’abord de rassembler chez soi en utilisant une technique antique, celle de la mobilisation contre un ennemi extérieur. Continue reading « Pour Riyad, l’Iran est un ennemi bien commode »