American Bashing (Le Cadet n° 84)

C’est un refrain ! C’est un chant ! C’est un hymne ! Que dis-je, c’est un hymne ? C’est un oratorio d’anti-américanisme débridé qui est entonné par nos cousins d’outre-Channel depuis le 15 août, mettant à l’unisson la presse de tous bords et les Communes, là où Tory et Labour communient dans une même dénonciation de leurs anciennes Treize Colonies, ajoutant les récriminations de Theresa May aux éditoriaux ravageurs de The Economist. Outre-Rhin ce n’est pas mieux, les plus hautes autorités ont fait part de leur amertume devant le lâchage américain.

Car par-delà une défaite programmée et datée (voir le Cadet du 24 juillet), débâcle très relative et déjà consommée militairement sur le terrain dès 2010, retraite que les États-Unis encaisseront toute honte bue et amortiront comme toutes celles qu’ils ont subies depuis 1945, par-delà le sort des femmes afghanes instrumentalisées comme vitrine de ce qui n’était qu’une occupation, ou des auxiliaires de l’OTAN dont on ne commence l’évacuation que lorsqu’elle devient impossible, c’est le ridicule d’Européens suivistes et aveuglés par un mythe de puissance sur lequel les Américains eux-mêmes sont beaucoup plus lucides, qui provoque un tsunami dans les relations transatlantiques. Et encore, tsunami est un grand mot pour ce qui n’est déjà qu’une vaguelette. L’OTAN ne serait qu’un piège à cons ? Charles de Gaulle le disait déjà il y a soixante ans [1].

Car quelle différence entre Kaboul et Saïgon, entre la Géorgie en 2008 et Suez en 1956 ? À quoi rime cette découverte toujours renouvelée d’une Amérique qui ne cesse de se dérober alors que nous savons, depuis vingt ans, l’ineptie de cette guerre expéditionnaire, son inconsistance militaire et son inutilité diplomatique ? Il faut revoir – sur Netflix – le film War Machine, bancale adaptation de l’essai de Michel Hastings, The Operators : The Wild and Terrifying Inside Story of America’s War in Afghanistan, le journaliste qui fit tomber Stanley McChrystal avec son article de 2010 paru dans Rolling Stone, « The Runaway General ». Tout était écrit, et ce n’est pas le retrait qu’on dit précipité qui est déroutant, c’est que l’Amérique ne soit pas partie il y a déjà dix ans. Ce qui choque ses alliés est que, durant cette décennie, ils n’ont ni rechigné ni objecté, ils ont fait ce que le Pentagone commandait en croyant que l’Article 5 valait engagement réciproque. Leur dépit théâtral est à la mesure de leur aveuglement proverbial.

On n’entend d’ailleurs pas, pour cette fois, les Trissotins de l’Atlantisme tenter de renverser la cabane et s’extasier sur le fait que les Américains finiront bien par gagner une guerre, vu qu’ils restent les plus forts et seuls à pouvoir mettre en place un pont aérien qui évacue 100 000 réfugiés en trois semaines. Il est vrai que, depuis Valley Forge, les anciens Insurgents ont une longue expérience des retraites. Et ce n’est peut-être que cela, l’American Way of War. Les Polonais et autres Ukrainiens feraient bien d’y penser tant qu’il est encore temps.

[1] « (Les Américains) veulent rester bien au chaud. Ce qui peut se passer, en réalité, ils s’en foutent complètement, même s’ils font semblant de s’y intéresser. Ce n’est pas ça qui les empêchera de dormir. » Verbatim du 22 août 1962, rapporté par Alain Peyreffite.

Le Cadet

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Mourir pour Varsovie ou pour Bruxelles ? (LV 156)

La politique polonaise est souvent pointée du doigt et l’actualité concernant le blocage du budget européen est clairement une crise. Mais avant de juger, ne s’agirait-il pas de notre côté d’une incompréhension d’une Pologne plus rationnelle qu’il n’y paraît ?

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La Vigie 100 : Cercle vicieux stratégique – La fin de l’atlantisme – Lorgnette : Conférence des ambassadeurs – Lectures de rentrée

Lettre La Vigie n°100 – 12 septembre 2018 Abonné? lisez directement la lettre en cliquant sur ce lien!

Lettre n° 100,  La Vigie du  12 septembre 2018 : pour ce numéro 100 qui marque le début de notre cinquième année, un numéro plus fourni que d’habitude.

Un nouveau cercle vicieux stratégique

En disqualifiant la guerre classique on a facilité le terrorisme stratégique ; en déclassant les Nations et les Etats, on a délégué la gouvernance du monde aux forces transversales. Ces deux cercles vicieux en se combinant ont créé une confusion générale contre laquelle il faut lutter, notamment en France par une grande stratégie articulée sur le retour à la paix civile à l’intérieur et à une nouvelle ambition de voisinage régional à l’extérieur. Telle est la thèse de ce numéro 100.

 

La fin de l’atlantisme

Il faut constater la fin de l’atlantisme, visible aussi bien au dernier sommet du G7 qu’à celui de l’OTAN. Ce projet, né au cours de la Seconde Guerre mondiale, plus proche de ce que certains appellent « l’Occident », réunit les deux rives de l’Atlantique sur une domination économique, militaire et morale. Or, ces trois facteurs disparaissent simultanément : D. Trump est plus un révélateur qu’un déclencheur de ce mouvement qui vient de loin. Le déclin semble irréversible mais beaucoup de conservateurs croient pourvoir le contrecarrer plutôt que de bâtir de nouvelles formes stratégiques.

 

Lorgnette : Le conférence des ambassadeurs

Lectures de rentrée : pour la rentrée, La Vigie vous propose une sélection d’ouvrages qu’elle a lus et qui méritent le détour : de quoi alimenter votre bibliothèque stratégique… Bonne lecture

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Photo crédit :  European External Action Service - EEAS on Visualhunt.com / CC BY-NC-ND

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