Pour ce premier billet de l’année, je récapitulerai logiquement la situation sur l’ensemble du front, grâce aux cartes de @pouletvolant3 que je remercie au passage Lien vers l’article complet en fin d’enfilade.
Au nord, les Russes essayent de rejoindre la rivière Oskil au-dessus de Koupiansk. Les Ukrainiens ont légèrement avancé vers Kyslivka.
https://twitter.com/Pouletvolant3/status/1609472470993588225/photo/2
Face à Svatove, les Russes ont globalement desserré la pression, repoussant les Ukrainiens à 10 km à l’ouest de la ville, sur une faible coupure humide (rivière Zherebets). https://twitter.com/Pouletvolant3/status/1609472470993588225/photo/3
Plus au sud, https://twitter.com/Pouletvolant3/status/1609472470993588225/photo/4 ils n’en sont pas là. Ils ont tout juste dégagé la P 66 à hauteur de Chervonopopivka. Les combats autour de Kreminna font rage. Malgré les espoirs ukrainiens de début de semaine, le bourg est toujours tenu. Le village de Dibrova, légèrement à l’ouest, est en zone grise. Les Ukrainiens ont progressé dans les bois au sud de la zone, d’où ils lancent des coups de sonde vers le nord. Juste à côté, le village de Bilohorivka est toujours tenu par les Ukrainiens et fait saillant dans le dispositif russe.
En descendant, Spirne est toujours aux Ukrainiens même si les Russes poussent à partir de Berestove qu’ils ont pris (c’était une zone grise). https://twitter.com/Pouletvolant3/status/1609472476005781504/photo/1 Juste au sud, le saillant de Yakovlivka que je signalais la semaine dernière n’a pas été exploité. Les Russes auraient gagné quelques mètres carrés aux faubourgs de Soledar (Bakhmoutske) bourg qui est plus sous pression.
Dans le secteur de Bakhmouth https://twitter.com/Pouletvolant3/status/1609472476005781504/photo/2, on note des combats violents mais indécis à la lisère E de la ville. Au sud, les Russes ont légèrement progressé à Opytne et surtout à l’ouest de ce faubourg, menaçant le sud de Bakhmouth.
Dans cette zone, ils prendraient à revers le village de Klishivka. Il est intéressant de constater une progression assez nette au sud de la ville (Andriivka, Zenolopillia) au-delà de la voie ferrée et, à un endroit, du canal.
Au sud d’Horlivka, petite poussée dans la zone qu’on n’avait pas notée depuis près de six mois : Pesée sur Niu-York, Novoselivka, Novoselivka Druha. Dans ce dernier cas, cela menace l’arrière d’Avdiivka. https://twitter.com/Pouletvolant3/status/1609472476005781504/photo/3
Nous voici donc dans le secteur de Donetsk. Il y avait eu des efforts russes en novembre, on n’observe quasiment rien en décembre, sinon au sud de Pisky https://twitter.com/Pouletvolant3/status/1609472476005781504/photo/4.
Rien cette semaine dans le secteur de Vuhledar https://twitter.com/Pouletvolant3/status/1609472480971993088/photo/1
ni dans celui de Velyka Novosilka https://twitter.com/Pouletvolant3/status/1609472480971993088/photo/2 .
Sur le front de Zaporijia, à noter dans le secteur de Huliapolje une avancée ukrainienne vers Myrne et Zahirne et une progression russe vers Kostyantinivka https://twitter.com/Pouletvolant3/status/1609472480971993088/photo/3 .
Poussée russe également au sud d’Orikihiv. https://twitter.com/Pouletvolant3/status/1609472480971993088/photo/4
Cette semaine a également été marquée par une succession de frappes de missiles par les Russes sur le territoire ukrainien. La nouveauté tient au fait qu’elles se sont déroulées quatre jours de suite, ce qui n’avait jamais été observé jusque-là.
De même, les Ukrainiens ont réitéré leur frappe dans la profondeur russe sur la base d’Engels, à 650 km de leur frontière. Il s’agirait soit d’un drone soviétique adapté, soit d’un nouveau missile de croisière qu’ils auraient développé seuls.
Appréciation militaire. sur un mois, les Russes ont légèrement progressé sur l’ensemble du front. Grâce aux cartes (merci encore à @Pouletvolant3) le constat est net, même si ici ou là les Ukrainiens ont également progressé. La question centrale est la suivante : à quel prix ? quel prix payent les Russes pour obtenir ce maigre avantage ? quel prix payent les Ukrainiens pour préserver leurs positions ? Je laisserai de côté les chiffres délirants et excessifs donnés par les partisans de l’un ou l’autre camp. Comme toujours avec les partisans, ils sont partiaux et donc sans grand intérêt. Pour ma part, je suis infichu de dire laquelle des deux parties s’épuise le plus. Constatons cependant que malgré les difficultés d’approvisionnements, l’artillerie russe dispose encore de la supériorité. Malgré donc les frappes d’Himars sur la logistique, malgré les sanctions, les usines doivent fonctionner à plein et approvisionner les canons sur le front. De même, les salves de missiles prouvent que le système dispose encore de munitions.
Comme je l’ai déjà dit, je ne sais rien du taux de pertes humaines sur le front. Je lis beaucoup de choses mais aucun témoignage de première main. La question du prix en pertes humaines reste donc ouverte, des deux côtés. Or, il faudrait disposer de cet indicateur car il marque l’usure, donnée essentielle dans la guerre de position à laquelle nous assistons. Quelques bribes sortent du côté ukrainien avec une usure des matériels, cf. la visite du ministre français Lecornu qui a déclaré que les canons Caesar souffraient (canons usés, qq pépins mécaniques). Mais cette usure des tubes doit être valable pour tous les canons, côté ukrainien comme russe. Cela affecte la précision des frappes et donc des appuis aux manœuvres. Voici un autre facteur de limitation des mouvements, constatée depuis quelques semaines et due pas uniquement à la météo.
Appréciation politique. L’idée de bannir la Russie du Conseil de Sécurité, proposée par Kiev, est tellement irréaliste qu’elle ne doit être analysée que comme un trait supplémentaire de la communication stratégique ukrainienne, obligée de toujours entretenir le feu sacré autour de sa cause. Voilà sa seule utilité.
Au bilan d’année, nous voici face à une guerre de position. Les deux adversaires s’arcboutent pour tenir leurs positions. Une modification radicale du front est peu probable. Mais dès lors, les sacrifices consentis pour un si maigre bilan rendent impossible les négociations. Ni les Russes ni les Ukrainiens ne peuvent partir de la ligne actuelle sur le terrain pour transiger. Chacun, pour entretenir le soutien à la cause et l’acceptation des sacrifices, est obligé de déclarer lutter jusqu’à la victoire, notion improbable. Aucun pourparlers n’est donc envisageable. Juste un conflit sans fin que nous devrions observer au long de 2023.
C’est sur cette note sombre et pessimiste que je conclus cette enfilade. C’est aussi pour moi l’occasion de vous souhaiter une bonne année, qu’elle soit au moins marquée par l’atteinte de vos vœux personnels. Je vous remercie de votre fidélité et particulièrement Éric, cartographe émérite, qui a contribué non seulement aux analyses du jour mais aussi au livre, « Guerre d’Ukraine », qu’il est toujours temps d’acquérir : depuis sa parution, rien n’a vraiment changé. https://www.economica.fr/guerre-d-ukraine-c2x38820888
Je ne sais donc si j’écrirai à un rythme toujours hebdomadaire. A défaut, vous pouvez lire ce billet d’un seul tenant ici (et continuer à lire La Vigie). Bonne semaine et bonne année.
OK