Paroles, paroles (Le Cadet n° 56)

C’est curieux chez les politiques ce besoin de faire des phrases. Ce mois de novembre en a été faste.

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Ça a commencé par (cliquez pour lire la suite)un bâton de maréchal dont tout le monde a tenté de se débarrasser. Puis des tweets pleins de la subtilité coutumière d’un Trump mécontent de ne pas avoir son défilé de la Victoire, qui s’est adonné au French Bashing usuel, chômage et Soldatenkino sur les Grands Boulevards. Le prétexte ? Une déclaration, aussi prématurée que son démenti a été tardif, sur l’armée européenne. Comme si Trump y croyait un instant, comme si celle et ceux qui le crient en sautant sur les tourelles de nos chars comme des cabris y croyaient un instant ! Encore des mots, toujours des mots, les mêmes mots, rien que des mots… Dans la foulée on a eu droit au projet de partage de la Force de frappe (d’accord mais si Berlin rembourse la moitié de ce que ça nous a coûté depuis cinquante ans, ne serait-ce qu’un demi-point de croissance annuelle), puis du siège de membre permanent au Conseil de sécurité avec son droit de veto. Des mots faciles, des mots fragiles… Et puis on reparle d’un avion européen 5ème génération, quitte à donner comme gage de bonne volonté la maîtrise du projet d’un futur char franco-allemand à Rheinmetall. Moi, les mots tendres enrobés de douceur se posent sur ma bouche mais jamais sur mon cœur

Pendant ce temps il est des discours plus audibles, comme celui du patron de la British Army qui a prévenu contre « toute initiative qui diluerait l’efficacité de l’Otan [qui représente] le centre de gravité de la sécurité européenne ». A bon entendeur… ! De toute manière, l’Allemagne, puissance continentale, va réussir ce tour de force de prendre le large tandis que la Grande Bretagne, puissance maritime, celui de ne pas parvenir à larguer les amarres. Et la France, pays des assignats, va une nouvelle fois faire banqueroute. Alors, l’armée européenne… ! Des mots magiques, des mots tactiques qui sonnent faux, oui tellement faux

D’autant que le problème n’est pas dans une mise sous tutelle opérationnelle des troupes de la Vieille Europe, mais dans notre capitulation dans la Guerre des normes. Ceux qui n’ont que le mot interopérabilité à la bouche jouent en même temps les fiers-à-bras, comme si les standards de nos véhicules blindés n’étaient pas ceux du Pentagone, comme si nos process de commandement n’étaient pas ceux concoctés par la Rand, comme si notre Royale n’était pas devenue une seconde Auxiliary Fleet de l’US Navy. Alors quand les généraux américains s’inquiètent de ce que les routes et ponts européens doivent être refaits parce qu’ils ne supportent plus le poids de ces nouveaux matériels copiés sur une lourde quincaillerie qu’on sait avoir fait ses preuves au Vietnam, en Afghanistan et en Irak, on peut toujours jouer les lointains, il est trop tard pour se prendre pour des caïds.

Caramel, bonbons et chocolat

Le Cadet (n° 56)

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