De l’échec proche et prévisible de la relation franco-allemande de défense et de l’Europe de la Défense en général (E. Lambert)

Eric Lambert, analyste averti des questions d’industrie de défense, nous propose cette analyse assez décapante. Merci à lui.

De l’échec proche et prévisible de la relation franco-allemande de défense et de l’Europe de la Défense en général.

Timeo Danaos et dona ferentes

Charles De Gaulle et Konrad Adenauer, François Mitterrand et Helmut Kohl, Angela Merkel et ses quatre présidents français successifs ont fait du couple franco-allemand le moteur apparent de la construction européenne. Si les premiers furent les artisans de la nécessaire réconciliation, les seconds les architectes du mariage, les suivants ont tenté de construire les mécanismes de collaboration à plusieurs niveaux. La défense fut une des premières parmi ceux-là. Si l’on peut considérer la relation entre les deux pays comme relativement équilibrée sur de nombreux aspects, quand on en vient sur le sujet de la défense, la relation est déplorable, industriellement, opérationnellement et, la crise ukrainienne le révèle, politiquement : en un mot, un échec. Un échec complet au détriment des compétences françaises notamment sur le terrestre. L’aéronautique de défense ayant la chance d’avoir un Dassault qui en défend les intérêts et les savoir-faire.

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Histoire de la mémoire de guerre d’Algérie (Pr Guy Pervillé) – Note de lecture

Cette année, l’Algérie fête le 60e anniversaire de son indépendance. Une telle date offre le prétexte à publications et si le déroulement de la guerre d’indépendance est appréhendé, la question qui s’impose depuis des années des deux côtés des rives de la mer Méditerranée est celle de la mémoire. Une mémoire de la guerre confrontée à l’histoire, deux notions en concurrence, sujettes à des enjeux éminemment politiques.

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Sécurité européenne 2022 : aux rsultats (LV 197)

Aux résultats à la mi-2022, la guerre en Ukraine apparaît comme un accroc majeur dans la trajectoire de la sécurité européenne 30 ans après la Guerre froide: une Ukraine qui souffre, une ligne de front à vif au cœur d’un continent qui se congèle, une réunification européenne ajournée, une Russie qui tourne le dos à l’Europe et s’engage dans de nouveaux horizons asiatiques coopératifs. La France qui ne peut s’en satisfaire doit garder sa liberté de réflexion et de proposition face à cette discontinuité stratégique. Cette guerre est d’abord une question de sécurité européenne, à traiter d’abord entre Européens. Peut-on encore, par un vrai confinement stratégique mieux coordonné, forcer la Russie à accepter un cadre de cohabitation plus coopératif en Europe? C’est en répondant à cette question que la France pourra réviser sa posture militaire et éviter le piège anachronique d’un toilettage capacitaire massif.

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Flottement conceptuel (LV 194)

De boussole stratégique en concept stratégique, le flottement est général alors que la guerre en Ukraine semble s’enliser. C’est le moment des premiers bilans chez les Européens qui se divisent sur la marche à suivre. C’est peut-être aussi pour la France celui de s’interroger sur sa posture de défense, de prendre son temps pour rechercher comment intégrer les leçons des surprises stratégiques venues de Moscou comme de Kiev.

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Positions occidentales (LV 190)

Derrière l’apparente réunification occidentale en réaction au conflit en Ukraine, des divergences pointent entre ceux qui estiment avoir gagné dans l’affaire, ceux qui ont le sentiment d’y avoir perdu, ceux qui restent sur leur position traditionnelle et ceux qui évoluent très vite. Aussi l’actuelle impression d’unité devrait s’affaisser à terme.

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La Vigie n° 186 : Coups africains | Géorgie tiraillée | Lorgnette : ouverture indonésienne

Lettre de La Vigie du 16 février 2022

Coups africains

Les récents coups d’État au Mali et au Burkina-Faso montrent la déception des élites et des populations africaines envers la France. Cela s’explique par une grande erreur stratégique, mélange de bonne conscience, d’utilisation trop longue de l’outil militaire, de manœuvres de gouvernance inadaptées et finalement, d’intérêts mal compris et donc mal mis en œuvre. La France a déçu et c’est de sa faute. Elle doit en tirer les conséquences.

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Géorgie tiraillée

La Géorgie est le seul pays du Transcaucase a être ouvert sur l’Occident, sur la Mer Noire, sur l’Europe. Le pays est hanté par les démons de conflits avec des provinces séparatistes et sa relation compliquée avec la Russie. Sa tentative de rapprochement avec les États-Unis s’est soldée par un échec, notamment militaire, mais la Géorgie a depuis entamé une nouvelle voie vis-à-vis de l’Union Européenne. Ce n’est peut-être pas une mauvaise idée !

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Lorgnette : ouverture indonésienne

La récente vente de 42 chasseurs Rafale à l’Indonésie est bienvenue, pour des raisons industrielles évidentes. S’il n’est pas sûr que cela favorise la défense française, cela constitue en revanche un atout dans notre politique étrangère, notamment en Asie du Sud-Est, terme ici plus exact que l’Indo-Pacifique. Notons d’ailleurs que cette vente s’accompagne de celle de deux sous-marins Scorpène. L’affront AUKUS est réparé (LV 176).

Paradoxalement, il a peut-être servi. En effet, comme beaucoup de pays de la région, l’Indonésie veille à une politique d’équilibre entre la Chine et les États-Unis, veillant à ne pas trop dépendre de l’un ni de l’autre. Elle avait suivi avec intérêt notre partenariat stratégique et industriel avec l’Inde, ce qui l’a incitée à examiner notre offre avec attention. Mais il est fort probable que la décision unilatérale des Australiens a joué : en estimant que la France n’était pas assez sûre, l’Australie a prouvé qu’a contrario la France avait une position équilibrée dans la région ? Ce fut probablement l’argument décisif pour Jakarta. Ainsi, outre l’Inde et Singapour, la France obtient un troisième partenaire dans cette Asie du Sud et du Sud-Est. Espérons que ce ne soit pas le dernier.

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Crédit photo : alicroche on VisualHunt

Coups africains (LV 186)

Les récents coups d’État au Mali et au Burkina-Faso montrent la déception des élites et des populations africaines envers la France. Cela s’explique par une grande erreur stratégique, mélange de bonne conscience, d’utilisation trop longue de l’outil militaire, de manœuvres de gouvernance inadaptées et finalement, d’intérêts mal compris et donc mal mis en œuvre. La France a déçu et c’est de sa faute. Elle doit en tirer les conséquences.

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Le retour de Folamour (Le Cadet n° 88)

Après la Françafrique (voir Le Cadet du mois dernier), c’est la dissuasion, autre pilier du gaullisme, qui disparait. Il n’y a que deux puissances européennes et nucléaires, la Russie et la France. Nos voisins ne sont pas nucléaires, les Anglo-américains (les Trident britanniques sont sous double-clef, pour peu que nos cousins d’outre-Channel se sentent encore européens) ne sont pas continentaux. Si les choses dégénèrent, si nous faisons la guerre en Europe, même à son extrémité orientale, nous montons aux extrêmes. Notre force de frappe interdit aux Russes de nous faire la guerre, mais elle nous interdit également de faire la guerre aux Russes. C’est une bivalence que le général Claude Le Borgne, récemment disparu, avait parfaitement comprise. Aussi, quand nous prenons le chemin de Moscou, ce ne peut être qu’en tant qu’ordonnateur du feu nucléaire français et non d’une présidence européenne, ni comme membre de l’OTAN.

Sommes-nous prêts, Français, à entrer dans une confrontation nucléaire avec la Russie pour l’empêcher d’avancer jusqu’au Dniepr qui serait la nouvelle ligne bleue des Vosges de nos intérêts stratégiques vitaux ? La question est vite répondue, comme dirait l’autre. Dès lors à quoi riment ces tartarinades qui émasculent notre capacité de raisonner souverainement ? Pourquoi surtout, au-delà de la crise de nerfs autour de l’Ukraine, inverser le précepte clausewitzien pour se rallier au fantasme américain qu’on est consterné de lire dans la dernière Vision stratégique du CEMA, qui fait de la politique l’antichambre de la guerre, une guerre avant la guerre, tout étant toujours de la guerre ? Qui a décrété, pour complaire à notre protecteur jusqu’à recopier les vieilles antiennes de la riposte graduée (seuil d’acceptabilité, seuil d’antagonisme et seuil de déclenchement d’une riposte), qu’Hobbes avait définitivement raison sur Rousseau ? La guerre en Europe a toujours été de la politique et ce n’est pas la Bombe qui y change quoi que ce soit, bien au contraire. C’est ce que vient incidemment de rappeler Poutine à l’issue de son entretien avec Macron : même pour la reconquête d’un seul village du Donbass ou d’un port de Crimée, la guerre sera nucléaire.

Fort heureusement l’article 5 du Traité n’impose rien de plus qu’un rappel d’ambassadeur, placebo en vogue en ce moment. A part satisfaire le rêve des généraux américains de planter leur bannière étoilée sur les tours du Kremlin, là où les Français plantèrent leurs trois couleurs en 1812, à quoi sert alors de s’avancer jusqu’en Ukraine ou en Finlande ? Moins les Russes auront de temps pour réagir, plus ils devront mettre en place des mécanismes de riposte automatique comme dans le film War Games, où l’ordinateur du Pentagone joue tout seul à la guerre nucléaire, nous menant dans la situation de Fail Safe et Doctor Strangelove. Espérons que ceux qui confondent guerre et cinéma, et ont fait monter la mayonnaise, sauront faire retomber le soufflé. Espérons.

Le Cadet

OSS 117, rentre à la maison ! (Le Cadet n° 87)

Une maladie de vaincus : on connait cette réponse de Foch aux négociateurs allemands qui se lamentaient à Rethondes de capituler non parce que leur armée était défaite, mais parce que les rues outre-Rhin se couvraient de barricades. Comment ne pas faire le rapprochement avec des médias africains remontés, nos convois attaqués, notre drapeau piétiné et brûlé et une junte malienne félicitant outrageusement les mercenaires russes de Wagner de premiers succès après tant d’années d’échecs français ? L’Afrique ne nous reproche pas tant de perpétrer le système colonial que d’être incapables de gagner la guerre contre le djihad. En un mot, de ne plus servir à rien. France go home ! Toute proportion gardée, la désillusion des Africains est la même qu’au soir du 17 juin 1940.

L’opération était globale, s’excuse-t-on à Paris, et ce sont ses aspects politiques et économiques locaux qui n’ont pas été implémentés (comme on dit dans les cabinets de consultants américains qui nous gouvernent). Mais c’est précisément parce que le plan était global qu’il a échoué ; non qu’une victoire militaire soit le sésame de la géopolitique, mais sans elle il n’y a rien de pérenne. Et il ne peut plus en être autrement : il est loin le temps de Serval, quand nos unités aéroblindées étaient fêtées en libératrices, nous sommes désormais incapables de rééditer l’exploit, et avant longtemps [1]. On a ainsi appris en fin d’année, la même semaine, que si la Corée du Sud et Israël ont budgété des hélicoptères lourds, ceux qui nous manquent dans le Sahel et que Barkhane a dû se faire prêter, les actuaires de Bercy ont opposé une fin de non-recevoir à nos Armées, qu’il s’agisse d’achats américains ou d’un appareil européen à concevoir. Faut pas jouer les riches quand on n’a pas le sou, chantait Brel. Quoique, quand il s’agit de nettoyer les bas de bilan des banques d’affaires ou de subventionner des start-up éphémères, les sous, on les trouve rapidement. La dépense oui, la défense jamais !

Et tandis qu’Américains et Russes se découpent une nouvelle fois le continent, les Français et cette fois les Britanniques étant aussi absents qu’à Yalta, l’Union Européenne annonce une réflexion, envisage de débattre, prévoit de se doter d’une boussole stratégique dans un futur hypothétique à anticiper à l’horizon d’une décennie. Mais les institutions censées la représenter sont aux abonnés absents. Si Kissinger se plaignait que l’Europe n’ait pas de numéro de téléphone, le progrès est qu’il sonne désormais dans le vide – à supposer que l’Amérique appelle. Quand on est incapable de formuler l’ombre du soupçon d’un semblant de volonté pour son voisinage, on ne prétend pas régenter des horizons lointains. Le temps de Faidherbe et Laperrine est clôt. Celui d’OSS 117 également.

[1] Voir Le Cadet : n° 67, « Sahelistan, poil aux dents », janvier 2020 ; n° 77, « Le Cyber des Tartares », décembre 2020 ; n° 82, « Sur la pointe des pieds », juin 2021.

Le Cadet

Source

LV n°182 : La France et le plein exercice stratégique : AMR 2022 | Nouvelle-Calédonie : et maintenant ? | Lorgnette : Coexistence durable !

Lettre de La Vigie du 22 décembre 2021

La France et le plein exercice stratégique : AMR 2022

Pour clore cette année et nourrir le débat stratégique de la présidentielle, voici présentées les quatre logiques qui structurent la posture stratégique de la France fin 2021 : les voisinages, les compétitions, les frictions et les guerres froides. Dans le monde post Covid qui s’entrouvre faut-il garder ce logiciel dépassé du XXe siècle? Peut-on en explorer un autre pour permettre à la France dans l’Europe et à l’Europe dans le monde de proposer un autre point d’équilibre, dégagé de la rivalité entre les États-Unis et la Chine ? L’année 2022 sera-t-elle un jalon dans l’histoire stratégique de la France ou la réactivation de ses actions antérieures ?

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Nouvelle-Calédonie : et maintenant ?

Le dernier référendum a logiquement – et légitimement – décidé du maintien de la Nouvelle-Calédonie dans la nation française. Il reste pourtant encore un destin à construire, tant le Caillou reste divisé : ces divisions ressemblent à bien d’autres, y compris en métropole. Au-delà, c’est une stratégie Pacifique de la France qu’il faut bâtir.

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Lorgnette : coexistence durable

L’expérience des peuples forge ce capital social qui leur permet d’être gouvernés. L’Amérique vient de la conquête de l’Ouest et de la prospérité, la Chine du Tianxia idéalisé et de l’harmonie prescrite, l’Europe du bannissement de luttes intestines après des tragédies dévastatrices. Il en résulte trois trajectoires stratégiques aujourd’hui non convergentes, même si un modèle essentiel de gouvernance occidentale s’affiche comme universel. Le modèle asiatique est dès lors vu comme alternatif et donc antagoniste. Mais ce que l’humanité gagnerait à s’unifier politiquement la priverait du pluralisme dont la richesse nait de la diversité acceptée.

Voici une leçon du dernier ouvrage de Jean Marie Guéhenno, « Le premier XXIe siècle » (ici) que LV vous recommande. Sa démarche tâtonnante mais rigoureuse dénonce le triomphalisme écervelé d’un Occident démocratique aujourd’hui en profonde crise identitaire qui s’aveugle d’une obsession chinoise et veut unifier le monde. Tout comme la Chine voulut prendre le meilleur de l’Occident pour garder le meilleur de la Chine, l’Occident ne doit-il pas prendre le meilleur de la Chine pour sauver le meilleur de l’Occident qui est le pluralisme assumé ? À explorer et méditer.

JOCV

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Crédit photo : Gouv NC