LV 174 : Afghanistan : raison garder

Le retrait d’Afghanistan était logique et ne surprend que les candides. Il s’inscrit dans une continuité américaine qui date d’Obama. Il ne constitue pas pour autant un déclin profond des États-Unis qui suivent leurs intérêts stratégiques du moment, comme ils ont toujours fait, ce qui ne devrait pas surprendre les Européens.

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La diagonale de la défaite (Le Cadet n° 83)

C’était une défaite annoncée, prévisible et prévue. Le Cadet, qui y a consacré plusieurs billets, n’écrivait-il pas il y a huit ans que « nous allons devoir dégager d’Afghanistan après plus de dix ans d’une guerre introuvable » [1] ? Un journaliste du Daily Telegraph rapportait dès juin 2006 ce constat d’une armée américaine en pleine débandade, uniquement préoccupée de sa survie, bande d’irréguliers incapables d’initiatives (voir l’opinion de Churchill à propos du fiasco d’Anzio) mal entraînés et mal équipés, MASH en moins drôle. La Rand Corporation avait elle-même annoncé la défaite dans plusieurs rapports circonstanciés en 2008 [2].

Qu’est allée faire la France dans cette galère, et que fait-elle dans une alliance militaire avec une nation de Puritains qui ignorent d’autant plus le monde qu’ils s’en croient rejetés et vont finir par l’être ? Pourquoi titrer, comme certain hebdomadaire, sur la déroute de l’« Occident » ? On va encore mettre cette débâcle sur le compte de l’ineptie du projet de nation building, pour ne pas voir celle d’une armée américaine qui ne connaît que la répétition du trauma, qui crut venger à My Lai la déculottée de Québec de 1775, qui envoya son 7th Cavalry tenter de gagner à Bagdad, comme à Wounded Knee, la bataille perdue de Little Big Horn. Une armée qui, profitant du débarquement à Newport d’un contingent de troupes françaises en 1778, ne trouva rien de plus pressé, après trois ans d’inaction contre les Red Coats, que de faire une razzia sur les villages indiens de l’Ohio ; dont l’urgence, en pleine Guerre de Sécession et poussée confédérée, fut de pendre en 1862 une trentaine de Sioux Lakota. Une armée de carabiniers d’opérette et de tortionnaires acnéiques livrés en Afghanistan aux mêmes pulsions que dans leurs collèges du Middle West, de faux caïds suprémacistes à qui les Britanniques ne parvinrent jamais à faire ôter les lunettes teintées, à qui les Français tentèrent en vain d’expliquer qu’il faut boire le café que le chef de village vous offre de mauvaise grâce, le village étant rasé le lendemain par un de ces AC-130 Gunship inventés au Viêt Nam (The aircraft that the Taliban feared most, se vante pornographiquement l’USAF), parce qu’un opérateur de drone, devant son écran dans le Nevada, a cru apercevoir un Taliban au milieu de la noce.

Mais l’Amérique ne se sent ni responsable ni coupable, et surtout pas d’abandonner les Afghans. « Les Soviétiques avaient laissé un gouvernement qui tint encore trois ans : combien de temps faudra-t-il aux barons de la drogue à qui nous confions les clefs du pouvoir, pour les abandonner aux Taliban ? [3] » Le temps qu’il faudra pour publier ces lignes. Mais pas beaucoup plus.

Le Cadet

[1] Pour la Revue Défense Nationale : « En attendant, mon officier… » Tribune n° 116, juillet 2011 ; « Drone mon amour », RDN, n° 761, juin 2013 ; « COIN COIN », RDN n° 767, février 2014. Sur La Vigie : « L’art de perdre la guerre », n° 58, février 2019.

[2] Parmi ces Counterinsurgency Studies publiées en cinq parties et une synthèse : Volume 4, Counterinsurgency in Afghanistan ; Volume 5, Rethinking Counterinsurgency in Afghanistan.

[3] « COIN COIN », op. cit.

La marche du monde: typologie des fractures et fissures en Amérique et en Europe en 2021

Nous sommes heureux de publier cet article fouillé, proposés par Jean Dufourcq qu’on ne présente plus et Pierre Laroque, X, ancien de Stanford et consultant énergie, est un observateur averti de la démocratie aux États-Unis où il réside. Merci à eux. LV

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  • Redémarrer, autrement ?

La pandémie du Sras-Cov2 qui sévit sur toute la planète a provoqué une panne générale dans la dynamique des sociétés et révélé des mouvements de fond occultés par la course effrénée au progrès qui sévissait jusque-là. Car un peu partout, les peuples en mouvement questionnent les projets qui les unissent et les structures qui les administrent. Ils disent leur volonté de reprendre la main sur leurs gouvernants.

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La Vigie n°170 : La campagne européenne de J. Biden | Orientation et synthèse stratégiques | Lorgnette : France et océan Indien

Lettre de La Vigie en date du 23 juin 2021

La campagne européenne de Joe Biden

La longue expérience de J. Biden a permis la réussite d’une tournée européenne méticuleusement préparée, satisfaisant toutes les parties (G7, UE, OTAN mais aussi V. Poutine) tout en les subordonnant à un objectif plus global, au moyen d’ambiguïtés soigneusement entretenues et pas toujours perçues par ses interlocuteurs.

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Orientation et synthèse stratégiques

Alors que nous vivons une période rare de l’histoire, la gestion indispensable d’un présent compliqué empêche les décideurs politiques de consacrer sereinement le temps nécessaire aux solutions à apporter aux défis de demain. Il est temps de réintroduire le temps long de la réflexion et de la stratégie, au sein de l’État et de la société, pour permettre à notre pays de tirer son épingle du Grand Jeu qui se met en place. Pour cela, la création d’un Conseil National d’Orientation et de Synthèse Stratégiques apparaît comme une nécessité.

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Lorgnette : France et océan Indien

Élément constitutif de l’Indo-Pacifique, l’océan Indien occupe une place singulière pour la France. Riveraine par le territoire (La Réunion, Mayotte, les TAAF) et par la mer (ZEE), elle y dispose à la fois de forces militaires permanentes de souveraineté ou prépositionnées à l’étranger, en vertu d’accords de défense conclus avec des pays partenaires (Djibouti, EAU), afin d’assurer la protection de citoyens et d’intérêts nationaux et de contribuer à la paix et à la stabilité régionales. Elle y dispose de partenariats stratégiques forts tels que ceux conclus avec l’Inde, l’Australie ou l’Indonésie.

Conjoncturellement, elle assure en 2021 : la présidence annuelle de la COI, regroupant Maurice, les Comores, Madagascar et les Seychelles, dont le SG récemment élu pour 4 ans est français ; ainsi que, pour deux ans, de celle du forum des CEMM de l’océan Indien (IONS) dont la session plénière se tiendra à La Réunion du 28 au 30 juin prochains. Elle est également membre de l’Indian Ocean Rim Association. État membre de l’UE à l’origine du lancement l’opération ATALANTA, de lutte contre la piraterie au large de la Somalie, la France dispose d’atouts précieux pour orienter l’ambition maritime de l’Union au cours de sa présidence de l’UE en 2022.

JOCV

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Crédit photo : OTAN (ici)

La campagne européenne de Joe Biden (LV 170)

La longue expérience de J. Biden a permis la réussite d’une tournée européenne méticuleusement préparée, satisfaisant toutes les parties (G7, UE, OTAN mais aussi V. Poutine ) tout en les subordonnant à un objectif plus global, au moyen d’ambiguïtés soigneusement entretenues et pas toujours perçues par ses interlocuteurs.

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La Vigie 168 : Du nouveau au Moyen-Orient I Dissuasion inversée I Lorgnette : Rafale en rafales

Lettre de La Vigie datée du 26 mai 2021

Du nouveau au Moyen-Orient

Le théâtre moyen-oriental évolue très rapidement. En effet, l’Arabie Séoudite semble mener une remise à zéro de sa politique extérieure, reprenant langue avec le Qatar et la Syrie, approfondissant son dialogue avec l’Irak et ouvrant même les ponts avec l’Iran. Pendant ce temps-là, Joe Biden avance prudemment dans sa reprise des négociations avec Téhéran, tandis qu’Israël se retrouve dans une impasse.

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La dissuasion inversée

La pensée stratégique française de la dissuasion nucléaire est traditionnellement dominée par une vision, extrêmement réaliste. La dissuasion du faible au fort est efficace et évidente. En réalité, des calculs purement matériels ne suffisent pas à expliquer l’usage, mais surtout le non-usage de la bombe nucléaire en premier depuis 1945. Il faut prendre notamment en compte des facteurs normatifs comme celui du “tabou nucléaire”: qui est véritablement dissuadé de faire quoi ? La question est plus ouverte qu’il n’y paraît.

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Lorgnette : Rafales en Rafales

Dassault vient de vendre une trentaine de chasseurs Rafale supplémentaires à l’Égypte, ainsi qu’une douzaine à la Croatie, tandis qu’on annonce une vente prochaine à l’Indonésie. Cette rafale de succès surprend, quand on se souvient des difficiles débuts commerciaux de l’appareil. Pourquoi l’avion se vend-il si bien aujourd’hui ?

Observons une reprise générale de l’équipement militaire à travers le monde d’autant que beaucoup de pays doivent renouveler leurs flottes, ce qui n’était pas le cas il y a 20 ans. L’offre russe est moins intéressante et beaucoup de pays ont souhaité prendre leurs distances avec les États-Unis, à la suite des excès de D. Trump. Dès lors, l’alternative européenne plaît. Le Rafale cumule plusieurs avantages : plus cher que le Gripen mais doté de capacités bien supérieures, il a été conçu pour être mis à niveau régulièrement et offre aujourd’hui une polyvalence que l’Eurofighter n’a pas.

Un avion national peut donc trouver son chemin commercial et la coopération internationale ne constitue pas forcément une nécessité économique indispensable : à rappeler au moment de dures négociations sur le SCAF !

JOCV

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Crédit photo : dalbera on VisualHunt.com

Du nouveau au Moyen-Orient (LV 168)

Le théâtre moyen-oriental évolue très rapidement. En effet, l’Arabie Séoudite semble mener une remise à zéro de sa politique extérieure, reprenant langue avec le Qatar et la Syrie, approfondissant son dialogue avec l’Irak et ouvrant même les ponts avec l’Iran. Pendant ce temps-là, Joe Biden avance prudemment dans sa reprise des négociations avec Téhéran, tandis qu’Israël se retrouve dans une impasse.

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La Vigie n° 164 : Point culminant chinois | Qu’est-ce qu’une grande bataille ? | Lorgnette : Suez et industrie

Lettre de La Vigie datée du 31 mars 2021

Point culminant chinois

Alors que les États-Unis ressoudent leurs alliés à travers le monde, notamment ceux de l’OTAN, afin de présenter un front uni face à la Chine, celle-ci montre un visage vindicatif et triomphant qui manifeste une fierté retrouvée : mais cet apogée ne marque-t-il pas un “point culminant”, celui que Clausewitz décrit comme le point maximum de l’offensive ?

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Qu’est-ce qu’une grande bataille ?

Les historiens militaires étudient les batailles. Mais qu’est-ce qui définit réellement une “grande” bataille ? Est-ce que le génie tactique déployé suffit ? Et est-ce que le commandant militaire peut en tirer une conclusion à son niveau ?

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Lorgnette : Suez et industrie

Il y a un an, lors du grippage du marché mondial à cause de la crise sanitaire, nous avions feint de découvrir à quel point nous étions dépendants d’une mondialisation qui avait fini par nous priver de moyens manufacturiers, rendant notamment impossible la fabrication de simples masques chirurgicaux de protection. L’heure était venue à la réindustrialisation de la France.

Aujourd’hui, une nouvelle crise de Suez (accidentelle cette fois) empêche à nouveau la circulation des marchandises dans ce canal entre Asie et Europe, par lequel transitent 12 % du commerce mondial.

Outre la volatilité traditionnelle des prix du baril de pétrole, des difficultés d’approvisionnement sur des produits électroniques s’annoncent déjà, en sus des coûts directs et indirects liés aux retards de livraison, surtout à une heure où les conteneurs sont déjà en flux tendus.

Retenons qu’après un an, on peut toujours tirer les mêmes conclusions relatives à l’insuffisante résilience de notre économie, dépendante du trafic maritime ; l’importance de réindustrialiser et de retrouver une forme d’autosuffisance. Et si là résidait la vraie « autonomie stratégique » ?

JOCV

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Crédit photo : peltthepundits.com

Point culminant chinois (LV 164)

Alors que les États-Unis ressoudent leurs alliés à travers le monde, notamment ceux de l’OTAN, afin de présenter un front uni face à la Chine, celle-ci montre un visage vindicatif et triomphant qui manifeste une fierté retrouvée : mais cet apogée ne marque-t-il pas un « point culminant », celui que Clausewitz décrit comme le point maximum de l’offensive ?

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Djibouti, carrefour stratégique convoité (LV 160)

Point d’appui établi à la convergence des grandes routes maritimes reliant l’Asie et le Moyen-Orient d’une part, à l’Afrique et l’Europe d’autre part, devenu carrefour stratégique pendant la Guerre froide, la République de Djibouti a vu sa dimension stratégique se renforcer à l’entrée dans le XXIème  siècle. Faisant l’objet d’investissements économiques massifs de la Chine et accueillant sur son sol les bases militaires de six pays étrangers différents, celles de la Chine et des États-Unis dépassant celle de la France – ancienne puissance souveraine sur le territoire, ce minuscule État s’est engagé dans une diplomatie subtile et lucrative, non dépourvue de risques, afin de garantir son autonomie politique, sa sécurité et son développement.

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